3/09/2014

La normalité du miracle



Paulo Cuelho parle du miracle. Il dit que nous crions au miracle parce que nous ne connaissons pas les lois de la nature.

Il suggère une prière : « Donne-nous notre miracle quotidien »…

J’ajouterais : « Ouvre nos yeux sur le miracle quotidien »…

On s’étonne d’un mot d’enfant… Il y a là une merveille de notre vie.
On s’amuse à voir un chaton jouer, un chiot courir après un bâton qu’on lui a lancé. Pourtant, c’est dans l’ordre des choses.

Je suis un photographe d’oiseaux.  J’observe leur comportement pour mieux les identifier. Ils m’étonnent. Cervelle d’oiseau? Essaie donc de le photographier, tu m’en reparleras!!!

Ce matin, je me suis réveillé tôt (trop!), j’ai porté attention à ma respiration. J’ai dormi, mais la machine en moi a fonctionné parfaitement. On oublie parfois la merveille de cette machine!!

On la prend pour acquise! Je pense qu’il y a trop de merveilles de nos vies qu’on prend pour acquises.

Hier, Monique est allée chercher la courtepointe qu’elle a créée et qu’elle a fait piquer par une amie qui possède « la » machine à piquer réglée par ordinateur.

À son retour, j’ai dit « Wow! ». Wow, pour le piquage d’Hélène. Wow, pour la création de Monique et sa réalisation résolument bien faite. Wow, pour le bonheur de l’artiste qui a poussé sa réflexion, qui a fait et défait son travail, qui a eu des « accidents » de parcours, et qui a réussi.

Merveille. Merveille aussi en moi qui réalise que le bonheur de ma femme m’est plus précieux encore que le mien propre.

Il faut demander que nos yeux soient ouverts sur le miracle quotidien de la vie.


C’est le premier pas vers l’amour.

2/21/2014

Coucou!

Il y a un moment que je n’ai pas écrit sur ce blogue. Pour une raison bien simple : je n’ai rien à dire.

Sauf que…  Voici quelques réflexions un peu décousues que je vous partage en toute simplicité.

Je lis, par petite doses, ces temps-ci, Une spiritualité laïque au quotidien, de Jacques Grand’Maison.  Et un livre que Monique m’a donné à la Saint-Valentin, Le manuscrit retrouvé, de Paulo Coelho…

Un élément de ma vie m’a sauté en pleine face : j’ai renoncé à tellement de choses depuis que je vis que je suis devenu un intrus dans ma propre vie… Un peu achalant de découvrir ça…

Puis, de fil en aiguille… Le fil étant les réflexions provoquées par mes lectures et l’aiguille le besoin que j’ai de recentrer ma vie… Accompagné par de « petites icones d’index » semées par Monique qui marche devant moi…

J’ai découvert de belles choses, cette semaine.

La première : Sois qui tu es. Accepte. Accueille. Il y a de trop nombreuses années, Monique et moi faisions partie d’une expérience de communauté dont une des valeurs était l’accueil de l’autre. Mais il faut aussi l’accueil de soi.

La deuxième : Partage qui tu es, avec qui le veut bien. Je suis un photographe d’oiseaux, par exemple. Je passe des heures à pourchasser les volatiles dans le but d’en faire de belles images. C’est tout simple. Il y a des enfants qui ne se tannent pas de jouer aux légos. Moi, c’est de faire des photos.

Quand on me demande ce que j’en fais, je suis toujours un peu mal à l’aise. Le but, c’est la contemplation, c’est la fusion. J’ai eu cet hiver des accès indescriptibles de bonheur en me gelant les doigts à moins vingt!

Je passe de longues heures à traiter mes photos, les classer, en jeter la majorité! Alors je dis que j’en fais la collection. Quand Monique me dit d’en mettre sur Facebook, j’ai une petite retenue. Ce n’est pas tout le monde qui aime nécessairement les oiseaux. Je ne veux pas m’imposer sur leur page. L’intrus, vous disais-je plus haut.

Et Monique me dit : « Il y a tellement de niaiseries sur FB, on pourrait aussi y mettre de la beauté. »  Soit!

J’ai mes fans qui « aiment » mes photos, qui commentent. J’apprécie, mais toujours en me demandant si c’est mérité. L’intrus, quoi…

Hier, Monique me parlait d’une image de Khalil Gibran (un auteur fétiche!), qui disait que lorsque tu donnes, c’est pas toi qui donnes, c’est la Vie qui se donne à elle-même. Tu es un témoin. UN TÉMOIN!

Donner, c’est témoigner de la Vie qui donne à la Vie. Recevoir, c’est témoigner de la Vie qui reçoit la Vie… Ça change tout.

Mes photos témoignent de la Vie qui volète en cherchant la vie. Je suis un témoin.

Je termine avec les mots d’action de grâce laïque qu’on entend de plus en plus : Merci, la Vie!

Et merci à toi, témoin, qui me lis…


5/19/2013

Conseils pour déprimés...


J'ai vécu cet hiver un épisode où le manque de soleil combiné au manque de sommeil m'a mené au bord de la dépression. Et il y a autour de moi des gens qui luttent discrètement pour le retour à un état plus plaisant...

J'ai copié je ne sais plus où un texte d'une personne dépressive que j'ai trouvé intéressant et je l'ai traduit, très librement. Le voici.

Je ne connais pas le nom de l'auteur, je sais seulement qu'elle a une page web intitulée DIYCouturier. Bonne recherche à ceux qui lisent l'anglais!


21 conseils pour vous ressaisir quand vous êtes déprimé.

Il y a quelque temps, j'ai réagi avec colère à propos de quelque chose qui circule sur l'Internet - les 21 habitudes des gens heureux. Cela m’a irritée comme ça ne se peut pas qu’on laisse entendre que si on n’est pas heureux, c’est qu’on n’agit pas correctement.


Je suis dépressive depuis aussi longtemps que je me souvienne. Ça se manifeste de différentes manières. J'ai fait une thérapie. J'ai fait Prozac. J’ai fait encore de la thérapie. Je suis fondamentalement mélancolique. Je m’étais réconciliée avec cet état quand j'ai déménagé, sans le vouloir, à un endroit qui était nettement moins ensoleillé en hiver. J'ai fait une dépression saisonnière. Je m’en suis sortie. Puis je suis devenue malade,  vraiment, vraiment malade. Il s'avère que c'est un trouble génétique douloureux et permanent. Ma dernière journée sans souffrance, c’était il y a quatre ans.

Alors, cette Religion du Bonheur vient de me faire disjoncter. Juste ... la colère. La rage. La dépression est grave, débilitante, souvent dangereuse, et la victime est stigmatisée. On laisse les gens se débrouiller par eux-mêmes.

C'est déjà bien assez sans que les gens vous rentrent dedans avec des conseils pour être heureux sur Facebook. Il n'y a pas de changement de comportement miracle qui permettra d’actionner le commutateur du bonheur pour vous. Je sais, j'ai essayé.

Un de mes amis m'a suggéré d'écrire quelque chose de mon point de vue parce que, de façon surprenante, je parviens à donner une impression de m’être ressaisie. Cela m’a choquée. Et je trouve cela drôle, mais je comprends son opinion. Je fonctionne. Je me suis adaptée. Je suis étonnamment bien. Je pense que le terme médical est «résilient».

Alors, voici.


Mes 21 conseils pour vous ressaisir quand vous êtes déprimé.


1) Sachez que vous n'êtes pas seul. Sachez que nous sommes une légion silencieuse, qui, chaque jour, fait face à l’égocentrisme et au jugement des Gens Heureux qui pensent que nous ne faisons pas d’efforts. Il y a des gens qui sont déprimés, des personnes qui ont été déprimés, et ceux qui n'ont pas été frappés encore.

2) Comprenez que les Gens Heureux généralement s’en font vraiment pour vous, même s’ils se trompent, que ça vient d'un bon coeur, même si leurs conseils vous font vous sentir responsable de votre maladie. Vous dire ces choses les fait se sentir mieux, même s’ils vous enlisent. . (S'ils continuent de le faire, voir le  n° 12).

3) Demandez l'aide d'un professionnel. Consultez votre médecin. Vous avez besoin de parler de ce qui est moins beau dans votre vie, et il y a des gens payés pour vous écouter et vous aider à trouver votre chemin vers la lumière au bout du tunnel.

4) Comprenez que les antidépresseurs ne peuvent pas tout faire. Ils sont utiles, ils vont vous stabiliser et vous donneront  le temps dont vous avez besoin pour orchestrer votre retour à la santé. Ils peuvent être utiles. Il y a beaucoup de choix. Ils peuvent ne pas vous convenir, et même si c’est le cas, ils prennent un certain temps à faire effet. En revanche, ils peuvent ne pas être pour vous. Travaillez avec votre médecin.

5) Prenez un pinceau, un crayon, une activité dont vous tiriez du plaisir par le passé et remettez-vous-y. Ou inscrivez-vous à une activité que vous avez toujours voulu essayer. Il y a une longue histoire de liens entre la dépression et la créativité. C'est une lueur d’espoir dans votre état, alors servez-vous-en  à votre avantage.

6) Prenez de petits repas sains et réguliers. Si vous avez de la difficulté à manger, essayez de vous en tenir à ce que vous aimez manger. J’ai déjà passé un épisode de six semaines  de tomates et de fromage à la crème sur un bagel deux fois par jour. Pas génial, mais c'était quelque chose (pour vous mettre dans le contexte, je suis une ancienne anorexique). Inversement, si tout ce que vous voulez faire, c'est engloutir des cochonneries, essayez de l’éviter en calant un V-8 avant de faire le no 9 pendant 15 minutes. Voyez comment vous vous sentez. Essayer de sortir de l’enfer en vous empiffrant de sucre va juste empirer les choses.

7) Pendant que vous faites le  n ° 3, faites faire une analyse sanguine. Si votre taux de fer ou de vitamine D est bas, ou si votre taux d'hormones est irrégulier, cela peut affecter négativement votre énergie et votre humeur.

8) Si vous êtes au lit et que le petit hamster fait tourner sa roue dans votre tête, comme j’appelle l’insomnie, regardez une émission de nouvelles économiques à la télé. Je vous garantis un effet Nyquil. Échangez votre café pour une tisane. Si vous ne pouvez pas dormir, essayez l'astuce suivante ....

9) Apprenez à méditer. Commencez par vous concentrer sur votre respiration. Ne dormez pas, ne pensez pas. Inspirez pas le nez, expirez par la bouche.  La méditation, c’est  se concentrer sur la conscience d'être présent dans votre corps, pas sur les pensées  qui courent dans votre cerveau. Cela peut ne pas être aussi bon que le sommeil, mais cela vous donnera un peu de repos et vous ré-énergisera.


10) Placez-vous face à une fenêtre aussi souvent que vous le pouvez - au travail, à la maison. Soyez attentif au monde extérieur. Regardez. Observez. Essayez de trouver quelque chose de beau ou d’intéressant sur quoi vous concentrer. Et il sera facile de vous rappeler qu’un sur cinq de ces gens là-bas se sentent comme vous.

11) Pleurez. Mieux vaut sortir son émotion que la garder en dedans. Parfois, ça ne convient pas, ou n’est pas bon pour la carrière de pleurer, alors trouvez-vous un endroit privé où laisser couler vos larmes.  Apportez des papiers-mouchoirs et lingettes, et de l’anti-cernes si vous vous maquillez. Vous pouvez toujours prétendre que vous souffrez d’allergies.

12) Tout «ami» qui croit résolument que votre dépression est due à la paresse, que vous ne faites pas assez d'efforts, qui vous reproche de ne pas vous reprendre en mains est un ami dont vous devez prendre vos distances.  La politesse (# 2) est une chose, mais il y a des limites. Vous n'avez pas à expliquer, vous pouvez tout simplement ne pas réagir. Vous vous sentez déjà assez mal, vous n'avez pas besoin de leur «aide».

13) Limitez vos contacts avec les gens qui drainent votre énergie. Vous savez qui ils sont. Souvent, vous n'avez pas le choix, mais vous pouvez évaluer ce que ça vous demande. Et, par la suite, soyez conscient de ce que vous demandez à vos proches.

14) Tout le monde a des problèmes à régler. Vous êtes pris avec les vôtres. . Reconnaissez que si vous n’êtes pas le seul dans votre cas, vous êtes unique.  L'herbe peut sembler plus verte chez le voisin, vous pouvez être jaloux ou envieux de ceux qui n'ont pas à faire face à la dépression, mais vous ne savez probablement rien des difficultés qui les préoccupent.

15) « Lâchez prise ou faites-vous charrier. » C'est un vieux dicton bouddhiste. C'est un moyen très utile pour saisir certains aspects de la dépression. La trahison, la colère, la peur ... lâcher prise est un processus - un processus souvent douloureux et difficile - mais c'est en fin de compte cela qui va vous montrer le chemin pour sortir du trou. La répétition du mantra peut vous aider lorsque vous êtes en proie à ces sentiments.

16) Portez des vêtements qui vous font vous sentir en confiance. Il faut autant de temps pour mettre de beaux vêtements qu’un pantalon de survêtement. Vous avez le goût de porter des pantalons de survêtement? Résistez à l'envie. La campagne « paraissez bien, sentez-vous mieux » ne se limite pas au cancer et à la chimiothérapie. Ou aux femmes.

17) Fuyez la fiction dramatique et la tragédie comme la peste. Pas de Grey’s Anatomy, ni de The Notebook, ou quoi que ce soit qui a remporté un prix Pulitzer. Vous en avez assez qui se passe dans La Vraie Vie. Comédie seulement. Ou des trucs trash. Vous avez de vieux épisodes de WonderWoman? J'ai le coffret. Vous avez du radotage insensé, comme la dernière superproduction CGI? Ou des livres intelligents, drôles? David Sedaris. Jenny Lawson. La fiction existe pour susciter l'émotion, et l'émotion dont vous avez le plus besoin dans le moment est le rire.

18) Faites des exercices physiques simples, si vous le pouvez. Cela peut être aussi simple que monter à l’étage par l’escalier, ou de marcher autour du bloc. Ça n'a pas besoin d'être complexe, ne doit pas impliquer l'ascension d'une montagne ou courir un marathon. Allez-y à petits pas.

19) La dépression va vous mentir. La dépression va essayer de vous dire ce que les autres pensent. Que vous êtes mal aimé, que vous ne valez rien, que les autres vous méprisent ou ne se soucient pas de vous - ou même vous souhaitent du mal. Vous n'êtes pas un médium. Continuez à répéter cela. "Je ne suis pas un médium". Répéter. La seule façon de savoir ce que l'autre personne pense est d’aller lui demander.

20) Si vous êtes bel et bien en train de perdre cette bataille, tendez la main à quelqu'un. J'ai été la personne aléatoire pas-si-proche qui a accueilli l’occasionnelle main tendue. J'aime à penser que je ne porte pas de jugement et que j’ai généralement assez de ressources, et d'autres ont pensé la même chose, alors ils ont fait appel à moi. Vous connaissez quelqu'un comme moi. Et ils vous aideront.

21) Pardonnez-vous. J'écris tous ces conseils, et je ne peux toujours trouver la force de même mettre le nez dehors, ou monter les escaliers, ou de manger mes légumes. Aujourd'hui, je suis sortie pendant dix minutes. Je vais essayer à nouveau demain. Et je vais essayer de nouveau le jour suivant.



Cette liste ne vous guérira pas. Cette liste ne remettra pas l’interrupteur du bonheur à ON. Mon Dieu, je voudrais que ce soit aussi simple que ça. L’idée ici est de ne pas saboter votre vie inconsciemment. Toutes ces petites choses? Comme votre taux de sucre sanguin, ou regarder les épisodes en rafale de l’émission House, ou les sempiternelles conférences « Essaie plus fort »  de votre soeur en pleine forme?

Ils font tous que faire face à la dépression est juste un tout petit peu plus difficile que normalement. Et c'est déjà assez difficile comme ça.


2/10/2013

Calendrier de l'amour


Voici le texte que j'avais envoyé à Patrick Lagacé, de La Presse, pour sa série sur l'amour. Il n'a pas pu tout mettre, évidemment. Mais je suis content qu'il ait aimé.

Calendrier de l’amour

Ah, l’amour. J’ai pensé faire un calendrier de mon cheminement, histoire de nommer des choses. Il y aurait un livre à écrire avec ça. Ne nous inquiétez pas, je vous l’épargnerai!

5 ans : Je quitte à la sauvette le magasin général (je suis de cette génération!) en criant à la fille du propriétaire : « Salut, ma blonde! » Je n’ai jamais su quelle a été la réaction des clients et flâneurs habitués…

7 ans : Au retour d’une visite scolaire à l’église, « en rangs  » les filles d’un bord, les gars de l’autre,  la même petite brune un an plus vieille que moi prend ma main et dit à ses amies : « Lui, c’est mon chum! » Je suis au paradis!

10 ans : Au retour d’une journée à un lac de villégiature, je m’arrange pour être à côté d’une fille un peu plus vieille que moi que ma mère trouvait bien délurée. Elle s’endort la tête sur mon épaule. J’ose lui embrasser les cheveux. Puis je m’endors aussi. Ma mère me traitera de « petit maquereau » pour m’être approché d’elle. Début de la culpabilité janséniste pour moi.

14 ans : Je reçois une lettre anonyme d’une fille  qui me donne rendez-vous dans un parc, le vendredi soir suivant. Elle portera un foulard bleu, me dit-elle. Malheureusement, chez nous, on n’a pas la permission de sortir le soir. Et puis, on se prépare à déménager et il y a trop à faire. Je ne connaitrai jamais mon petit foulard bleu, mais je me suis senti reconnu. Soupir…

15 ans : Mon premier baiser…  elle s’appelait Vivian, ne parlait pas français, mais de toute manière, ce n’est pas cette langue-là qui m’intéressait! On jouait  à un jeu de jeunes dans un édifice abandonné, sorte de jeu de cachecache où on embrassait la fille que l’on trouvait. Vivian était une experte et sa langue me menait au nirvana!  Ah, les hormones!!!

16 ans : Mon premier échec. Je reviens d’un séjour à un hôpital lointain et j’apprends que ma blonde du moment était allée au cinéma avec un autre. Je me rends chez elle pour la confronter. On jase un peu, puis je finis par lui demander si c’est fini, nous deux. Le père de la belle en avait assez entendu et me mit à la porte manu militari. Ah, que je me suis senti incompris! Quelle belle nuit à ressasser ma douleur…

20 ans : Je suis attiré par la présidente des élèves infirmières d’une école voisine de l’école normale de gars que je fréquente. Drôle de fille qui avait le don de garder le contrôle de la situation. Je n’arrivais jamais à l’embrasser, c’est elle qui le faisait, mais jamais sur la bouche. Frustrant!  Par contre, nous étions sur la même longueur d’onde et nous sommes rencontrés souvent. C’est elle qui m’a montré que l’amour, c’est autre chose qu’une attirance physique. Par contre, moi, j’ai glissé dans une relation d’amitié, plus proche de la fraternité. Lorsque j’ai été finissant, elle a fait des approches pour qu’on aille plus loin, mais moi, je ne la désirais plus. Mais je l’ai toujours aimée et l’aime encore.

Ne vous inquiétez pas, ma femme est au courant. Dans le fond, s’il y a une destinée, Madeleine (nom fictif) m’a préparé à rencontrer ma femme.

21 ans : Je quitte ma blonde la journée de sa fête après lui avoir donné un cadeau somptueux pour des moyens d’étudiant… Je crois aujourd’hui que c’était pour moi une « fuck friend » avant l’époque et la mode… Fuck friend avec qui je n’ai jamais couché : les jansénistes réservaient la pénétration pour le mariage! Faut dire que la fille était jeune et que sa mère parlait de mariage : j’avais l’impression qu’elle voulait se débarrasser de sa fille… Mais en réalité, probablement, elle voulait simplement qu’on se marie pour éviter que sa fille devienne une mère célibataire et fasse honte à sa famille.

22 ans : Je sors brièvement avec l’institutrice dans la classe de qui je fais mon stage d’enseignement au primaire. Erreur. Je ne l’aime pas vraiment, mais elle me voue un amour passionné. J’aurai de la misère à m’en débarrasser, elle me harcèlera jusqu’à mon école. Je devrai employer des mots durs que je regretterai, bien sûr, j’ai été bien élevé. Heureusement, à cette époque, on se confessait encore chez le curé et cela avait un effet magique sur la culpabilité. Ou pas…
24 ans : LA rencontre.  Elle accompagnait mon frère lors du bal de graduation de ma sœur. Dans ce temps-là, la famille proche était invitée à se joindre aux célébrations.

Moi, j’étais  accompagné d’un « blind date », jolie fille intelligente qui ne m’intéressait pas du tout. J’avais toujours l’œil sur celle qui accompagnait mon frère.

Au retour vers la maison, je prends le volant et à un moment donné, on s’arrête pour consulter ma sœur et son copain qui suivent dans une autre auto. On va manger où?

Pendant que mon frère descend pour s’entendre avec les autres, je dis à celle qui l’accompagnait : « On part tu? »  Elle me répond d’un oui rieur.

L’idée était de commencer une sorte de jeu de poursuite en auto. Sauf que mon frère, fatigué, décide d’aller se coucher.

Nous passons la nuit à se promener en auto. On se cache dans un parking discret pour regarder les photos de la famille que ma future épouse a dans sa bourse et on attend patiemment que l’heure de la messe arrive. Eh oui, c’est l’époque… On va à la messe, le dimanche.

Cette petite brune est comme Madeleine. En contrôle. Tellement que lorsque je réussirai à l’embrasser, après quelques mois de fréquentation, j’aurai l’impression d’une victoire et elle d’une défaite! Ah, je l’ai conquise de haute lutte!

Elle m’enverra des photos avec un mot gentil et je lui répondrai plus longuement. Comme nous vivions dans des villes éloignées, l’essentiel de notre fréquentation prendra une forme littéraire. Nous devons avoir encore ces lettres dans une boite poussiéreuse quelque part dans la remise.

Les choses sont allées vite : connaissance en juin, décision de se marier en octobre, fiançailles à Noël et mariage en juillet. Voyage de noce de trois semaines, jusqu’au bout de l’argent qu’on avait!

On n’avait pas couché ensemble avant de se marier, on avait du retard à reprendre!!!

27 ans : Notre premier enfant. Le médecin dit que c’est un garçon, mais je m’en fous, il est né, le divin enfant. Je vis une sorte d’orgasme affectif dans un sanglot venu du fond des tripes. Je n’ai jamais vécu quelque chose d’aussi intense.

Nous en aurons trois autres, sur une période de dix ans. Et nous avons aujourd’hui treize petits-enfants!

Je fais un long saut, j’ai aujourd’hui 70 ans, je vis avec Monique depuis 45 ans. Nous nous aimons toujours, mais mettons que les hormones sont au ralenti.

Je pense parfois que nous sommes devenus des colocs affectueux. Elle a dans la maison son territoire où elle fait de l’artisanat. J’ai mon local avec mon ordinateur, ma caméra pour les oiseaux. Il y a le jardin dehors, une chaloupe sur le fleuve.

Il y a les petits-enfants  à garder, les amis à voir.

Justement, hier, on a enterré une amie. 77 ans, cancer généralisé. Son mari, mon ami, mon frère, me disait il y a quelques jours : « Tu sais, Fabien, que nous allons la perdre » Ah, ce « nous »… L’amour à notre âge, n’est pas face à face. Il est  englobant.

Mon ami, bientôt 80 ans, me disait aussi : « Il ne me reste que quelques jours pour l’aimer »… Hier, aux funérailles, il s’est levé pour faire d’une voix ferme un hommage à sa femme. J’y ai vu beaucoup d’amour.

Je conclurais que l’amour nous prend de l’intérieur par les hormones. Quand, à 16 ans, je dansais un slow avec ma blonde et que je l’embrassais et la serrais dans mes bras en disant  des « Je t’aime » éperdu, j’aurais dû dire : « Je m’aime, je m’aime… »

J’ai lu quelque part que l’amour commence lorsque la lune de miel est terminée.

L’amour, c’est aussi une culture. J’ai vécu l’amour janséniste, avec son arrière-gout de culpabilité. Nos jeunes sont plus libérés, trop parfois.

Il y a chez nous des intégristes qui vivent l’amour différemment.

Reste que l’amour est affaire de compromis. Sans compromission.

On aime parfois voir l’amour comme dans les films ou les romans. C’est une erreur. Ça, c’est aimer l’amour, pas aimer l’autre.

Je lis ma petite-fille sur Facebook. Quel romantisme … Ah, que je souffre… que je souffre… Ou Ah, que je trippe!

L’amour viendra.








Libellés : , , ,