10/04/2009

Comment ça va, chez vous?

Ça va? Question banale, s’il en est. Sur utilisée, spécialement, pour prendre contact avec un interlocuteur sans s’impliquer. Quelle déception quand la personne décode mal l’intervention et commence décrire ses petits bobos…

Je suis tombé sur une conférence de David Suzuki, cette semaine. On sait qu’il est un éminent savant militant pour l’environnement. Et il a un talent hors pair pour vulgariser les grands enjeux de notre monde et un sens de l’image vraiment percutant. Je m’inspire ici de sa réflexion.

J’ai retenu deux ou trois de ses images, qui me laissent dans un état d’émerveillement craintif. Il y a un mot pour ça? Vertige, peut-être… Il disait que le mot « éco », dans écologie et économie, signifie « home ». La maison familiale, si on veut. La maison familiale, pour l’humanité, c’est la biosphère, une mince couche collée sur la surface de la terre. Trrrrès mince couche.

Tout ce que nous consommons vient de cette mince couche. Tout ce que nous rejetons reste dans cette même couche. Autrement dit, tout ce que nous consommons, nous le prenons dans la maison familiale. Et nos déchets, nos rejets, nous devons trouver une pièce dans la maison familiale pour les caser. Il n’y a pas d’ailleurs. C’est ici qu’on crée les problèmes, et ici, dans la maison familiale, qu’on les résout. Quand on enfouit des déchets domestiques ou industriels, on les cache simplement au sous-sol de la maison… Quand les pays industrialisés envoient leurs déchets ailleurs, ce n’est pas ailleurs. C’est juste dans la pièce voisine… Un peu dérangeant comme constatation, non?

Autre image : il faisait remarquer que chez les Primitifs (et le monde primitif n’est jamais bien loin dans l’histoire, étant donné que l’Homme est un petit nouveau sur la planète…), on était collés sur la nature. On en dépendait. Alors si la chasse n’était pas bonne, on implorait le Dieu de la Chasse. Si la sécheresse ruinait les récoltes, on suppliait le Dieu des Récoltes. Le sorcier déterminait la conduite à tenir, et souvent, la seule conduite à tenir qu’il voyait, c’était d’offrir au dieu un sacrifice. Et moi, je dirais que le top du top des sacrifices, c’était le sacrifice humain.

Or, il y a un nouveau dieu dans notre maison. C’est le dieu « Economics » des Américains. Le dieu « Economy » de M. Harper. Le dieu « Économie » de M. Charest. Je dirais que lorsque ça va mal au plan économique, les sorciers (économistes, magnats de la finance, industriels ) engagent des pleureuses (médias, monde politique) qui s’agitent, s’arrachent les cheveux, déchirent leur chemise : l’économie va mal, où est-ce qu’on s’en va! Autrement dit, le dieu « Economics » est fâché! Va falloir lui offrir un sacrifice. Vous me voyez venir. Qui va payer pour le sacrifice? Pas le sorcier, bien sûr. On met sur l’autel du dieu Économie l’argent des contribuables… Le bon peuple ne peut rien faire, car le sorcier est trop puissant. Il est le seul à pouvoir apaiser le dieu Economy, selon lui… Car il est le seul à le connaître intimement…

David Suzuki nous invite à un changement de perspective tout simple… et pas si simple! Pour lui, l’écologie est la connaissance de la maison familiale, et l’économie, son administration. Pour que ça change, et que nous cessions de nous souiller les pieds dans notre propre maison, il s’agit simplement de remettre le « éco » dans l’éco-nomie. Gérer la maison familiale demande simplement de tenir compte de la nature de la maison. De la nature, point.

L’économie va mal? La gestion fait partie de la vie familiale, mais elle n’est pas la vie, non? Si ta gestion est inadaptée, chose, change ta gestion, cibole! (Je fais mon petit Falardeau, là!)

Pour savoir comment ça va chez nous, ce n’est pas aux économistes qu’il faut le demander…

J’aime bien cette autre idée (de Suzuki?) : le monde va continuer éternellement, mais l’espèce humaine n’y sera peut-être pas. « Survival of the fittest », disait Spencer, repris par Darwin. La sélection naturelle. Si nous ne nous adaptons pas, nous ne survivrons pas.

Les corneilles et goélands vivront longtemps. Ils en auront pour des millénaires à se nourrir de nos sites d’enfouissement « sanitaire »….

Comment ça va, chez nous? On peut toujours répondre « Ça va, ça va… »

Libellés : ,