R.I.P. Noël?
Monique et moi venons probablement de passer notre premier Noël « de vieux », cette semaine.
Chaque année, le mois de novembre ramène la même question, le même problème : comment harmoniser l’emploi du temps de tout le monde? Pas facile avec quatre enfants qui ont leur propre famille grandissante, qui doivent composer avec celui de chacun sa belle-famille!
Cette année, c’est notre benjamine qui nous reçoit au Jour de l’An. Nous avons bien hâte de voir tout notre monde. Mais pour Noël, nous étions libérés… Libérés pour quoi?
Dans notre cas, il faut dire que Monique s’est fracturé la cheville à la fin de novembre et qu’elle recommence tout juste à marcher. Pas encore question de « set carré » pour elle! De plus, elle se paye un rhume teigneux (Tousse pis tousse pis Alléluia!) qu’elle ne veut pas partager, l’égoïste! Alors on s’est fait un petit repas tranquille et j’ai essayé une recette toute simple de brochettes de poulet. Avec un bon vin donné par nos amis Alexis et Heidi lors de leur dernière visite, ce fut un repas pas si mal, finalement.
Nous avons regardé des films. L’homme qui parlait à l’oreille des chevaux et Voyage au pays de l’imaginaire. Comme je couvais une migraine, je pleurais tout le temps! C’est un des pré-symptômes de la migraine, pour moi : une tristesse inexplicable m’assaille, j’ai comme un goût de pleurer en dedans et la moindre émotion dans un film ou une série télévisée déclenche l’arrosoir!
Alors hier, le 25, méga-migraine. Bof, j’ai des médicaments et on sait que ça va finir un jour.
Puis je me faisais cette réflexion : passer Noël seuls, pour des parents, c’est le prix à payer pour que leurs enfants vivent leur propre vie.
Ça m’a rappelé une décision difficile que nous avons eu à prendre comme jeunes parents. Chaque année, nous étions reçus chez mes parents et avec le nombre de petits-enfants qui augmentait, le Père Noël n’en finissait plus d’extraire de son sac les présents que les enfants déballaient rapidement pour ensuite attendre : « OK, est-ce que j’en ai d’autres? » Suivaient trop souvent les disputes d’enfants fatigués, l’impatience des parents, les interventions parfois maladroites des mononcles..
Un jour, nous en avons eu assez et nous avons annoncé à nos parents que l’année suivante, nous allions fêter Noël chez nous, avec nos enfants. Et comme nous étions au cœur d’un cheminement religieux dérangeant pour nos proches, notre décision a été difficile à accepter pour mes parents. « Vous ferez cela quand nous serons morts », ma mère m’a-t-elle dit un jour.
Ma mère vit toujours et est en relativement bonne forme, à 89 ans. Si nous l’avions écoutée, nous n’aurions jamais pu nous donner le temps de vivre Noël avec nos enfants. Nous aurions sauté une génération…
Mais je comprends ma mère maintenant. Noël tout seuls, ouais…
Et nous avons poursuivi notre cheminement. Ce que nous contestions, à l’époque, c’est le fait que les gens, même devenus adultes, redeviennent des enfants quand ils retournent chez leurs parents. On joue aux cartes, on prend un verre. D’accord, on réserve une heure pour remettre les cadeaux aux enfants, puis allez jouer, qu’on s’amuse! Ton cousin t’a fait mal? Va donc voir ta mère… Ah, les mères, on ne reconnaîtra jamais assez leurs talents de diplomatie. Même s’il leur fallait parfois saisir un petit monstre par les bras et le mettre à réfléchir dans le coin! La diplomatie, M. Bush vous le dira, a quand même ses limites!!!
Mais ce qui nous irritait le plus, c’était l’orgie de consommation. Nous étions d’avant-garde là-dessus : on parle quand même des années 70! Et nous n’avions pas de mérite. Nos parents avaient connu l’économie de subsistance. Ah, l’invention du sac de farine ( de fleur, comme on disait à l’époque!) de couleur que les mamans recyclaient pour confectionner des robes craquantes pour leurs petites filles... Dans l’économie de subsistance, on ne peut acheter de cadeaux, on n’a pas d’argent. Qui va accepter un porcelet dans une poche en paiement d’un pistolet de plastique qui lance des dards à ventouse? Mais on était ingénieux. Et le garçon qui recevait un canif découvrait rapidement qu’il pouvait fabriquer tous les fusils qu’il voulait. Génération de « gosseux »!!!
La génération suivante avait le choix. Ou on reprenait le modèle de vie frugal des parents, ou on compensait : « Je vais te payer tout ce que je n’ai pas eu… » Monique et moi étions plutôt du premier genre.
Aujourd’hui, quand nous découvrons les ravages de la société de consommation, la menace qu’elle fait porter sur l’avenir de la planète, nous sommes contents d’avoir résisté autant que possible à l’appel du Dieu Consommation, ou du Père Noël. Non, Société Moderne, non, le Père Noël n’existe pas… S’il existait, il quêterait des subventions aux gouvernements! Car tout se paie.
Santa Claus aurait dû s’appeler Santa Coke, mais le marketing aurait été transparent, et ce n’est pas bon pour la mercatique d’être transparente… On recrute des poètes pour inventer une magie de Noël et on passe sous pression sa pacotille plus ou moins à rabais.
Des parents diront que c’est important, la magie. Oui. Mais ça dépend laquelle.
Parlant de magie, il faut que je vous parle du p’tit Jésus. Monique et moi, nous avons donné un sens religieux à Noël pendant plusieurs années. Nous faisions la démarche de l’avent avec nos enfants, et nous leur racontions l’histoire de Noël . Personne ne peut nous reprocher d’avoir voulu y croire!
Mais voilà… Nous avons été désillusionnés, comme des enfants qui découvrent que le Père Noël a la même montre que l’oncle Paul. Et la désillusion a la même profondeur que notre besoin de croire.
Nous avons été désillusionnés par la religion. Nous cherchions la foi et on nous offrait de la religion. C’est comme les apôtres, il cherchaient le Royaume et ils ont eu l’Église catholique. Méchante pacotille…
Remarquez, des choses merveilleuses se sont passées dans l’Église. Des héros, des héroïnes ont accompli des miracles. Mais souvent malgré l’Église et non à cause d’elle. Les visiteurs des communautés religieuses qui faisaient la ronde de leurs missions étaient souvent déçus de constater que les missionnaires étaient de moins en moins religieux. Soit ils travaillaient fort pour le développement de la société, soit ils se trouvaient une zone de confort pas trop fatigante…
La religion, l’opium du peuple... C’est vrai que c’est une drogue… Et comme pour toute dépendance, j’imagine qu’on ne peut jamais être assuré d’être guéri...
Vous comprendrez que la « magie » de Noël, la messe de minuit, les petits anges dans le chœur, les décorations… Ça ne nous dit plus rien.
Voir des enfants pleurer parce qu’ils ont peur du Père Noël, ou d’autres parce qu’ils n’en peuvent plus de se tenir tranquille en attendant le Minuit chrétien, ça m’agace. J’ai l’impression de me retrouver dans une salle d’attente avec un petit qui grouille en attendant son vaccin!!! À qui on va donner un suçon pour lui faire oublier sa douleur...
Alors, oui, je suis devenu un Vieux Grinch! Pourquoi pas?
Mais nous allons rencontrer notre famille le premier de l’An. Nous allons bien sûr nous offrir des cadeaux. On boucle la boucle! Car Noël a été inventé, ne l’oublions pas, pour essayer de faire oublier la fête païenne du solstice d’hiver, la naissance de Mithra, etc.
Oublions les mythologies, même la chrétienne et celle de la consommation, et souhaitons-nous et à nos enfants une excellente année 2009.
Elle ne sera pas facile, paraît-il. Espérons simplement qu’elle accouchera d’un monde meilleur.
Amen!
À vous tous, une excellente année 2009 !
Libellés : consommation, famille, Noël, religion, solitude